jeudi 30 décembre 2010

Pause écriture !

Le frimas de l'hiver a eu raison de moi, les tasses de chocolat m'appellent à mon bureau, dans la chambre qui m'a vue grandir (ou presque)... Un peu de silence sur ce blogue, mais des idées qui noircissent des pages. C'est parti pour une épopée chevaleresque, un manuel de l'essentiel et une farandole parisienne... !!

Je n'en dis pas plus...!

lundi 13 décembre 2010

N'est pas Jane Austen qui veut !

Pardon pour les lecteurs. Il va s'agir ici de littérature féminine. Promis, un jour, je me rattraperai. Mais cependant, les lectrices ne vont pas non plus ressortir avec une idée de cadeau ou de lecture pour le coin de la cheminée avec le chocolat chaud.Il est difficile de lire Les caprices de Miss MaryCar ce livre est non seulement mauvais, mais il est en plus médiocre. Pour les fans de Pemberley et autres destinées austeniennes, si vous le lisez, accrochez-vous. Ca fait mal à Jane. Et je vais vous dire pourquoi.


L'intrigue. Après la mort de l'horripilante Madame Bennet, Mary souhaite quitter la tutelle de Fitzy Darcy pour mener sa propre vie. À quarante ans, encore célibataire, elle dévore les chroniques sociales d'Angus, un journaliste qui dénonce les atrocités de l'Angleterre industrialisée. Mary, qui veut gagner sa vie et son indépendance, part sur les routes pour écrire un livre qui dénoncera les conditions de vie des miséreux. Et personne, pas même l'autoritaire Darcy, ne l'empêchera de se réaliser, après avoir vécu dans l'ombre.

L'auteur(e?), c'est Colleen MacCullough. Déjà, ça aurait dû retenir ma lecture. Pour mémoire-ou-info, Colleen nous a quand même commis un best-seller de la littérature-guimauve sur plus de 600 pages, dans les années 80, avec le mythique Les oiseaux se cachent pour mourir. L'histoire d'un prêtre devenu cardinal, quand même amoureux d'une femme portant une robe rose couleur de cendre. Aveu numéro Un : j'ai lu ce pavé, même vu le film. Ahem. Bref, entre Colleen et Jane, malgré le fait qu'elles se retrouvent dans le même rayonnage littérature britannique, y'a un fossé. Colleen écrit mal, à mon goût. Et pour oser faire une suite à Pride and Prejudice (Orgueil et préjugés), 'faut de l'audace. Cela implique de toucher à Saint-Darcy, et de priver les austeniennes de toute imagination d'avenir radieux pour les personnages. En même temps, c'est surfer sur la vague facile janeaustenmaniaque. Facile. Et pourtant, elle a raté. Mais POURQUOI ?

Aveu numéro Deux : je ne suis pas fan de Jane Austen, ni même de son écriture #pastuer, je savoure pourtant les adaptations filmées de ces oeuvres avec joie (et bonne bouffe). Je la trouve terne, et fade par rapport à la richesse de ces personnages, dont la peinture psychologique reste la plus grande réussite. En ce sens, Colleen est mon amie. Aveu numéro Trois : mon favori, c'est Sense ans Sensibility (Raison et sentiments). Ceci étant dit - je suis toujours vivante - Colleen a fait comme Maurice le poisson rouge. Elle dépasse un peu trop les bornes des limites.

Le féminisme austenien dévoyé. Chez Austen, les femmes sont les personnages principaux, et sont dotées de sacrées personnalités, pour la plupart. Cultivées, réfléchies, ironiques, tendres, sottes, gourdes, insupportables, tout y est. Leur féminisme est bien réel : elles se montrent capables (et ne font pas que le revendiquer bêtement) de se distinguer par l'opinion, la personnalité, de leurs (futurs) époux. Une fois ce point évoqué, on observe que ces femmes font le choix de la liberté dans la soumission et l'obéissance à leurs époux (non mais vous voyez Darcy pouponner vous ?!). On aime. Ou pas. Mais il en est ainsi chez Jane Austen. On peut d'ailleurs noter que si cela marche dans ses romans, cela n'a pas "fonctionné" pour elle-même, qui décéda seule et sans époux digne d'elle. Or, chez MacCullough, le féminisme qu'elle confère à son personnage principal, Mary Bennett donc, la soeur de Jane, Lizzy et tutti quanti ne "colle pas". Il est trop empreint de modernité post-époque victorienne. Trop militant. En outre, Mary tranche trop avec l'image que l'on a d'elle dans le livre d'Austen. Si bien que cela n'est pas crédible du tout. Pourtant, il y avait de l'idée à reprendre ce personnage. On voit aussi le même écueil pour les autres soeurs Bennett (accrochez-vous) : Jane en femme trompée, Lizzy en mère au foyer nunuche, non.

Les personnages masculins sont terribles. Darcy est dur, sec, égoïste, ambitieux, négligent, méprisant, mauvais père. Il ne lui reste aucune qualité. Quant à Bingley, c'est un esclavagiste adultère. Colleen prend presque un malin plaisir à détruire ces deux modèles masculins. Darcy surtout en prend pour son grade. Ca fait vraiment mal, un mythe littéraire autant écorné, sans réflexion ou portée littéraire. Mais surtout, cela est incohérent avec l'oeuvre d'origine : Jane Austen a aussi introduit un aspect "roman d'éducation sentimentale". Avec son livre, MacCullough revient dessus et fait de l'ascension morale des personnages un cycle : s'ils reviennent à leur mauvaise nature chez elle, pourquoi ne pas continuer indéfiniment à faire de Fitz une brute épaisse quand il s'unit à son épouse, à faire de Bingley un esclavagiste immoral après leur demande de repentir ? Ainsi, l'influence positive de Lizzy est inexistante. De fait, sa portée littéraire qui l'amenait chez Austen à transformer Darcy en homme bon n'existe plus. Le personnage n'a plus de but fictionnel. Moche. D'autant plus que Mary ne prend qu'une tournure ridicule et grotesque.

L'intrigue (trop) rocambolesque. Du début à la fin, Colleen a fait le choix de l'action à un rythme effréné. Cela tranche trop, là aussi, avec l'accent de l'oeuvre d'origine sur les évolutions psychologiques plus que sur les péripéties. Il arrive à Mary beaucoup trop de choses improbables, peu crédibles, totalement loufoques. Si encore MacCullough avait évolué vers une aventure à la Dickens, on aurait pu voir une double influence très riche. Que nenni. Du début à la fin, les mésaventures de Mary sont peu intéressantes. Mais en plus, on ne parvient pas à compatir avec le personnage (ni même avec les autres en fait). La fin totalement abrupte, ne convainc pas. Bref, là aussi, passez votre chemin. La fin des autres personnages n'est pas non plus totalement satisfaisante.

Cerise sur le gâteau. Il nous le fallait ! Pour finir sur un parfum de scandale, Colleen a fait du seul fils de Darcy un être efféminé, littéraire, poète (clichééé !) que Fitz méprise. Ajoutez à ça un goût pour les détails sans intérêt (les règles de Mary, tout un poème), des scènes sans portée visuelle... J'ai envie d'un Charlotte Brontë pour cet hiver, pas vous ?

PS : , y'a un article positif.

mercredi 8 décembre 2010

Love you

Je suis amoureuse. C'est sa faute. C'est aussi à cause de lui que j'ai voulu commencer le journalisme. Dans mes rêves les plus fous, je passais plus d'une heure avec lui, et j'écrivais l'interview idéale. Aujourd'hui, je ne sais plus si je voudrais toujours le passer à ma question. D'autres le font, et il répond avec brio. Il vient d'une époque où le cinéma français avait encore de la gueule. Sa gueule.

Alain Delon a commencé dans le sillage des plus grands maîtres du cinéma. Petite frappe banlieusarde, engagé volontaire dans l'armée ou super pote de malfaiteurs, l'homme est à lui seul un héros de Manchette ou de tout autre polar vendu dans un hall de gare. Paris, c'est son terrain. Tout ça tombe finalement plutôt bien, parce que les truands ou les poulets, il va les fréquenter assidûment sur tous les Pathé de France et de Navarre pendant une bonne trentaine d'années. Moi quinze ans plus tard, je découvre Paris au gré des courses-poursuites - et des VHS enregistrées - dans les vieilles bagnoles blanches que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, moi y compris. Sauf que moi si, en fait.



Comme je suis quand même une fille, je l'aime bien aussi faisant l'amour et la guerre en Italie dans Le Guépard, je suis à ses pieds quand il plonge dans La piscine avec cette veinarde de Romy Schneider, et je minaude un peu - mais pas trop, c'est quand même Delon - quand il offre des caramels à Dalida. Encore aujourd'hui, il a la classe, celle des vrais grands : quand il explique la différence entre acteur et comédien et qu'il se range dans la première catégorie, on comprend qu'il n'est pas si orgueilleux que cela, on l'écoute et on la ferme. Que pu****, il l'a mérité, sa place en Plein soleil.

Comme je suis amoureuse, je fais souvent pause quand on aperçoit un rictus narquois sur sa gueule, quand ses yeux bleus scillent à peine, à la recherche de la clé qui pourra débloquer la voiture. Je lui donne le Bon Dieu sans confession, même quand il est le tueur de Philippe Greenleaf. J'aime quand il fume et que personne ne l'emmerde parce qu'il est à l'intérieur du bar. J'aime quand il parle de sa voix grave contre un flic, un voyou ou une femme. Je suis contre la peine de mort quand Gabin ne peut pas le sauver, et j'aime les oiseaux quand il nourrit son canari. Je lui pardonne ses infidélités, ses compagnes nombreuses sur la pellicule... et même dans sa vie. Même ses films plutôt genre série B à faire se marrer Les Inconnus. Parce qu'un jour Tancrède, Guillaume de Saint-Preux, Le samouraï... ont transformé la dégustation d'un verre de Bayley's en petit moment de cinéma, à la papa. Sauf que moi, je n'ai jamais revendu les disques de ma soeur pour me payer une place - y'a prescription.

Aujourd'hui, ça m'fait un peu mal, tout ça. Parce qu'y'a plus d'films. Y'a bien eu un navet, des séries télé pour me faire patienter, des Paris-Match piteusement pathétiques, des participations douteuses à la télé. Il parle de lui à la troisième personne quand il évoque la nostalgie des Melville, Romy, Ventura, Gabin, comme s'il s'était laissé là-bas, avec eux, dans les studios de Boulogne-Billancourt, ou en train de poser pour la photo NB Harcourt. Il n'a plus de réalisateur pour le faire tourner, plus d'actrice pour succomber à son charme, plus de truand à dézinguer au coin d'une rue du IXème arrondissement. Et de toute façon, sa cigarette, coincée trop haut entre les premières phalanges de l'index et du majeur droits, est interdite dans les lieux publics.

J'me cale dans l'fauteuil, j'lui indique la sortie du piano-bar avant l'arrivée du commissaire. Parfois je le croise quand j'attends le bus. Et quand il pleut bien sur Paris, que le ciel est gris, je sors mon imper, mon Borsalino (je l'ai acheté exprès, lui...) et je vais chercher Jeff Costello.